Sylvia Vitale Rotta, fondatrice et présidente de Team Créatif, et présidente de l’European Brand & Packaging Design Association (Epda), fait le point sur ses divers engagements
Sylvia Vitale Rotta, comment allez-vous ?
S.V.R. Très bien. Nous avons eu un excellent mois de décembre 2023 et le premier trimestre de l’année 2024 a bien démarré. Nous sommes donc optimistes pour la suite. Et c’est tant mieux, car 2023 n’a été facile pour personne : une année en dentelle. Là, c’est beaucoup mieux, et on sent un fort dynamisme.
Comment se passe votre mandat de présidente au sein de l’Epda ?
S.V.R. Je suis effectivement présidente de l’Epda depuis 2022, à l’occasion du 30e anniversaire de l’institution, ce dont je suis très fière. L’Epda a été créée par des personnalités éminentes du monde du design, dont bien sûr Gérard Caron ou Jean-Jacques et Brigitte Evrard. Je succède à cinq ou six présidents qui, heureux hasard, ont été de grands designers, mais surtout des hommes ! De façon générale, cette association constitue un très beau projet, porté par des membres de toute nationalité, et notamment Claudia Josephs, la directrice générale, qui nous tient en pleine forme. D’autre part, il y a beaucoup de vraie bienveillance au sein de l’Epda avec des échanges d’avis, d’opinions, de méthodes et de process. Il n’y a pas de concurrence entre nous et on s’appelle quand on a besoin d’aide : une agence va effectuer un store-check, un audit ou un sondage pour une autre agence.
L’Epda organise prochainement un évènement à Bordeaux
S.V.R. Tout à fait et ce sera les 18 et 19 avril, pour un cycle de conférences sur la thématique Thrive – Don’t just survive que l’on pourrait traduire par « Épanouissez-vous – Ne vous contentez pas de survivre ». Bref, parler du fait de voir plus grand, de réussir, sans se contenter de juste faire face aux difficultés que nous rencontrons tous, et pas seulement dans le business du design.
C’est un message d’optimisme fort ?
S.V.R. En effet. Depuis quelques années, beaucoup d’agences ont du mal à grandir et sont dans un mode survie. Et cela n’est pas bon du tout. Il faut redonner de la puissance, car le rythme d’avant Covid n’a pas été vraiment retrouvé. Et pour ceux qui l’ont retrouvé, les budgets sont durement négociés à la baisse. Par conséquent, tout le monde souffre. Or, pour aller bien, une agence doit croître et disposer des ressources nécessaires pour attirer les meilleurs talents, mettre en place la diversité et mener des travaux de recherche. Si l’on est dans une configuration de survie, on ne peut rien faire de tout cela. Par conséquent, des speakers du monde entier vont venir témoigner lors de cet évènement Epda à Bordeaux pour expliquer comment ils ont fait pour passer le cap. Et il n’y aura pas que des personnalités du design. Il y aura aussi des acteurs du milieu du vin qui viendront témoigner de comment ils ont ressuscité des vignes, non pas pour survivre, mais pour se développer, grandir et s’épanouir. Nous aurons aussi un speaker qui vient de Chine qui expliquera comment cela se passe chez lui. Bref, plein d’idées, de moyens et de méthodes pour faire grandir son agence et sortir d’une activité morose avec, par exemple, le développement durable, pour lequel le design est central pour mieux prendre soin des hommes et de la planète. Voilà qui va nous aider à nous épanouir et à retrouver une autre cadence.
Comment procédez-vous chez Team Créatif pour ne pas être en mode survie ?
S.V.R. Nous, on travaille sur des marques iconiques et puissantes, comme Lactel, Lindt ou Panzani, qui disposent d’un héritage particulièrement riche. Nous faisons refleurir ces marques en conservant leur essence et en les adaptant aux nouveaux besoins des consommateurs. Actuellement, on mène un gros travail pour Bonduelle pour les aider à se révéler et être à nouveau une marque contemporaine.
Quels sont vos projets en ce moment ?
S.V.R. Tout d’abord, notre grande ambition est de continuer à être B Corp, car, vous le savez, ce label doit être renouvelé tous les trois ans. C’est un challenge : il faut chaque fois être meilleur, la politique de B Corp étant de progresser en permanence. Cette ambition d’amélioration continue est très structurante pour notre programme RSE, pour notre diversité et pour aider nos clients à devenir petit à petit davantage sustainable. Ensuite, nous avons comme objectif de consolider encore davantage la zone Amérique, avec des talents français qui vont partir là-bas. On veut aussi continuer à grandir avec nos clients en délivrant ce dont ils ont vraiment besoin, d’un point de vue stratégique et créatif, mais aussi en matière de business thinking afin que le design soit considéré comme un réel asset et non pas comme une simple dépense. Les budgets design sont essentiels pour la marque et le consommateur et nous devons en permanence convaincre de l’importance du design dans la chaîne de valeur. N’oublions pas le Brésil qui est sur une belle dynamique et qui a déménagé dans de très beaux bureaux, ce qui est une bonne nouvelle ! De façon générale, on veut continuer à séduire l’ensemble de nos collaborateurs, soit 250 personnes, ainsi que tous nos clients. Je note que le métier demande de plus en plus d’experts qualifiés dans des domaines pointus. À ce propos, je remarque l’essor phénoménal de l’IA qui, évidemment, ne va rien remplacer, mais au contraire va nous permettre d’aller plus loin et plus vite en diminuant les gaspillages de temps et de moyens. On le voit bien avec nos équipes de création qui utilisent l’IA et se concentrent sur ce qui est essentiel, en retenant ce qui va fonctionner de façon quasiment certaine. L’IA apporte de la précision et de la confiance.
Un message pour terminer ?
S.V.R. Vis tes rêves, car si tu ne le fais pas, personne ne le fera pour toi. Arrêtons de parler, agissons !
Une interview de Christophe Chaptal
Article précédemment paru dans le Design fax 1316
