Élie Kouamé, président et coordinateur Europe de l’Alliance Internationale pour la Promotion du Design en Afrique (AIPDA) nous fait part des objectifs et ambitions de l’association.
Élie Kouamé, pourriez-vous vous présenter ?
E.K. Je suis designer et consultant en développement local, basé en France depuis 2017. Je suis d’autre part président et coordinateur Europe de l’AIPDA. Ma formation initiale est celle de graphiste, diplômé de l’École des Beaux-Arts d’Abidjan (ndlr : aujourd’hui École supérieure d’arts plastiques, d’architecture et de design ou ESAPAD). En arrivant en France j’ai suivi le mastère professionnel Gestion de projets culturels de l’IESA, puis j’ai été certifié en design de produits et services numériques avancés par The Design crew.
Quels sont les objectifs et missions de l’AIPDA ?
E.K. La mission principale est de contribuer à renforcer la présence du design en Afrique ainsi que dans les territoires afro-descendants. De là, se déclinent quatre autres missions : accroître la visibilité du design en Afrique et dans les territoires afro-descendants ; renforcer l’acculturation au design via des programmes spécifiques de formation et d’accompagnement ; encourager l’innovation avec des cadres et des environnements d’expression pour permettre aux acteurs de concevoir des produits et des solutions grâce au design ; accompagner le développement des territoires et des localités. En effet, une économie locale se construit sur la base de plusieurs entreprises qui forment un marché, puis un secteur. Ce sont ces secteurs une fois agrégés qui forment l’économie de ces territoires. Dans cette optique, le design est levier majeur de développement.
Comment voyez-vous évoluer le design en Afrique et dans les territoires afro-descendants ?
E.K. Je vois le design évoluer très rapidement, car, du fait d’un certain retard de développement, il y a une volonté forte des différentes parties prenantes de s’autoformer, de s’engager, de se surpasser pour aller au-delà de ce que propose l’environnement de vie et de travail. Sur la base de ce constat et de ces envies, le design évolue vite. Et même si depuis toujours le design est d’abord perçu comme un outil au service de l’esthétique, les entreprises le voient surtout comme un outil permettant de simplifier les processus. Nous, on veut apporter le design au service des stratégies et des organisations, ainsi qu’au service des politiques publiques. Pour résumer : il y a une envie forte et un besoin manifeste. De ce fait, le design va prendre une place majeure à la condition que les acteurs formés au design aient le courage et la volonté d’implanter le design au service du développement. C’est pour cela que nous parlons de renforcer la présence du design pour dépasser cette perception uniquement esthétique.
Quels sont les pays d’Afrique les plus avancés en matière de design ?
E.K. Ce sont d’abord les pays africains anglo-saxons : Afrique du Sud et Nigeria. Ensuite viennent le Maroc et la Tunisie, et enfin l’Afrique de l’Ouest où le design en est à ses balbutiements, même si des pays comme le Ghana essaient de se démarquer.
Quel est votre regard sur le design français ?
E.K. Le design français est pour moi une source d’inspiration depuis toujours, avec cette dimension qui fait appel aussi bien à la démarche scientifique qu’aux inspirations culturelles. D’autre part, comme graphiste puis comme consultant en développement local, j’ai pu constater combien le design français contient une dimension décisionnelle, notamment la discipline du design des politiques publiques.
Quelles sont les prochaines étapes de l’AIPDA ?
E.K. On va effectuer le lancement officiel de l’association début 2025, évidemment en Afrique, soit en Côte d’Ivoire, soit au Maroc. Après, nous verrons comment collaborer avec les institutions sur place pour établir des cadres d’intervention formels et structurés.
Un message pour terminer ?
E.K. Oui : j’appelle les différents acteurs du design en France et en Europe, ainsi que la diaspora africaine, à rejoindre l’AIPDA, car nous sommes en mesure de construire de nouveaux leaderships en Afrique grâce au design.
Une interview de Christophe Chaptal
Article précédemment paru dans le Design fax 1332