Lamia Mialet est cofondatrice et présidente de Cozy Air, société spécialisée dans le contrôle de la qualité de l’air. Elle nous parle de sa vision du design et de la façon dont elle l’utilise.
Lamia Malet, pourriez-vous vous présenter ?
L.M. Je suis ingénieur chimiste, spécialisée dans la qualité de l’air. L’idée de Cozy Air m’est venue en 2014 à la fin de mes études. Dans cette optique, j’ai suivi à l’IAE Lille le parcours entrepreneuriat du master Management de l’innovation. J’ai ainsi pu structurer mon idée jusqu’à la création de l’entreprise en 2017.
Comment le design est-il entré dans la vie de Cozy Air ?
L.M. Avec mon associé, Charles Cornille, également cofondateur, nous avons voulu disposer d’une identité visuelle forte, et d’une charte graphique, pour poser les bases de l’image de Cozy Air. Cela a été le départ d’une première réflexion sur comment utiliser le design pour se différencier. Puis, nous nous sommes intéressés au design de notre produit pour qu’il soit facile à installer et surtout visible, car nos concurrents ont tendance à vouloir cacher leurs appareils. On est le seul à avoir fait une pyramide inversée ! Ce n’est pas parce que nous sommes en B to B que nous ne devons pas présenter des solutions élégantes ! Quand on regarde notre produit, il ne suggère pas la qualité de l’air, et c’est volontaire. Ensuite, tout naturellement, nous nous sommes intéressés à la plateforme logicielle qui accompagne nos capteurs, et qui permet à nos clients de mettre en œuvre les actions correctives. Nos clients ne sont pas des experts de la qualité de l’air et il a donc fallu intégrer dès l’origine un parcours utilisateur bien réfléchi . La démarche du design nous a permis d’adopter une posture d’usage différente. Tout le monde peut faire de l’objet connecté, mais nous, on apporte de vraies solutions d’usage. On est les seuls sur le marché à proposer à la fois un produit et une plateforme servicielle avec cette notion d’expertise de l’ingénieur et de valeur d’usage du designer. Pour être franche, j’ai fait du design sans le savoir, en travaillant avec des designers UX/UI pour la plateforme, une agence de com pour le branding et une agence de design pour le produit. Du coup, j’ai décidé de suivre une formation en design management à l’IAE Lille, formation pour laquelle je suis également l’ambassadrice.
Que représente Cozy Air aujourd’hui et quelles ont vos ambitions ?
L.M. Nous sommes une équipe de six personnes et avons distribué à ce jour 600 produits assortis de leurs abonnements à notre plateforme de services. Nous sommes présents en France, Belgique, Suisse et Allemagne. Notre objectif est d’utiliser très largement la data pour améliorer la qualité de l’air. On est plutôt sur la partie commerciale actuellement, car notre solution est au point. Notre objectif est d’atteindre le marché européen et également d’aller sur les secteurs tertiaires, les écoles et les crèches. On souhaite également aborder le marché canadien, et plus largement le marché international. On vise à être la référence en matière de qualité de l’air, et surtout en ce qui concerne la data. Nous avons d’ailleurs un data scientiste dans l’équipe. Concernant les aspects économiques, nous avons effectué deux levées de fond, en 2018 et 2022, et notre objectif est d’atteindre l’équilibre en 2025. Au-delà de ces éléments, nous souhaitons à terme intégrer Cozy Air dans un groupe pour développer notre service sur une large échelle. Ce serait l’idéal pour atteindre de gros marchés.
Comment fonctionnez-vous en matière de design ?
L.M. Comme je le disais, nous travaillons depuis le début de Cozy Air avec deux designers externes UX/UI, une agence de com et une agence de design, Pilipili, basée en Belgique, que nous avons connue dans le cadre du programme Interreg. Pilipili a parfaitement compris nos exigences : on voulait un produit blanc à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur. Ainsi, la carte électronique est blanche, et même tous les câblages. Tout devait être blanc pour donner ce côté épuré. De ce fait, en matière de qualité perçue et d’esthétique, on est bien au-delà de nos concurrents, tout comme ce qui a trait à la facilité d’usage, totalement instinctive. On installe notre appareil sans mode d’emploi. D’autre part, et c’est important, nos bureaux d’études et nos industriels sont tous basés en Belgique et l’assemblage se fait à Tourcoing. La partie plateforme est entièrement conçue et pilotée en interne et est une propriété à 100 % de Cozy Air. On veut tout à la fois que nos clients soient totalement rassurés, et être vertueux en émission carbone. Nous sommes dans une véritable démarche de designer.
Un message pour terminer ?
L.M. Le sujet de la qualité de l’air est très complexe. C’est difficile d’y aller. Et même si la crise sanitaire a mis en avant la problématique de la qualité de l’air, personne n’a vraiment compris ce que cela voulait dire. Le design permet de rendre le sujet accessible, raison pour laquelle il nous accompagne depuis le départ chez Cozy Air. On veut que le message soit clair et le design est un outil formidable pour cela. En fin de compte, le design nous a apporté un vrai usage sur un sujet fortement complexe.
Une interview de Christophe Chaptal
Article précédemment paru dans le Design fax 1301