Marc Chassaubéné, en sa qualité de président de la Cité du design, nous parle de la Galerie nationale du design, et Laurence Salmon, directrice du développement culturel et artistique de la Cité du design, nous fait part de l’approche de l’institution en matière notamment de diffusion du savoir.
L’interview de Marc Chassaubéné
Marc Chassaubéné, pouvez-vous nous présenter la Galerie nationale du design ?
M.C. Il s’agit d’un projet que nous menons en collaboration, notamment, avec le Cnap, le Mobilier national et le Centre Pompidou. La vocation de la Galerie nationale du design, située à Saint-Étienne, est d’accueillir les grandes collections françaises, et pas uniquement, je tiens à le préciser, de mobilier. Nous présenterons en effet les collections de diverses institutions, tous objets confondus. Ces expositions suivront sur un cycle annuel, avec des thématiques racontant chacune l’histoire du design.
Quel est l’axe clé que vous suivez avec la mise en place d’un tel dispositif ?
M.C. L’idée est de confirmer Saint-Étienne comme capitale du design et, en même temps, de combler un manque : accélérer l’acculturation au design et par ricochet amplifier sa diffusion. On n’a en effet jamais vraiment pris le temps de raconter le design. D’autant que les industriels stéphanois ont toujours su intégrer des créateurs dans leur production, et que ce qui s’est passé à Saint-Étienne en la matière s’est reproduit ailleurs en France, et même en Europe. Il est donc important, pour bien comprendre le design, d’expliquer ses racines, et en particulier ses racines industrielles.
Quels publics visez-vous ?
M.C. Notre positionnement est d’abord et volontairement grand public : il s’agit de présenter et faire comprendre l’univers du design. Mais nous n’oublions pas les spécialistes du design qui pourront y trouver des œuvres très pointues. Bref, nous croisons démarche pédagogique et approche de spécialiste, de la création jusqu’à la production.
Quels sont vos objectifs chiffrés ?
M.C. Nous n’avons pas encore établi de prévisions fermes, mais nous voudrions dépasser la fréquentation du musée d’Art moderne et contemporain de Saint-Étienne, soit plusieurs centaines de milliers de visiteurs. La Galerie nationale du design doit être l’un des grands lieux du design en France. Je dirais même un lieu de référence.
À quelle date l’ouverture est-elle prévue ?
M.C. L’ouverture officielle sera effective courant 2025. D’autre part, on est en train de réfléchir à la gouvernance, le comité scientifique étant déjà constitué.
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L’interview de Laurence Salmon
Laurence Salmon, pourriez-vous vous présenter ?
Je suis historienne du design, journaliste et j’ai exercé comme professeur, notamment à l’ESAD-Orléans et à l’ECAL à Lausanne. Actuellement, j’ai la charge du développement culturel et artistique de la Cité du design.
Quelle est votre vision de la Cité du design ?
L.S. Il est nécessaire, je pense, de resituer la Cité du design dans le contexte stéphanois. D’abord d’un point de vue historique, car Saint-Étienne est l’un des plus importants berceaux de la révolution industrielle – et que, aujourd’hui toujours, se trouve un réseau particulièrement actif d’entreprises. D’autre part, dès le début de l’ère industrielle, il y a eu une appétence pour le “bon” produit, celui qui rassemble valeur d’usage et attractivité. Cette combinaison entre démarche de l’ingénieur et approche proposée par celui que l’on n’appelait pas encore designer est une réalité, qui, vous le constatez, n’est pas nouvelle. Pour toutes ces raisons, nous avons ici des acteurs industriels dotés d’un savoir-faire de qualité, et qui dans le même temps ont la maturité et l’envie de faire appel au design. Par conséquent, la Cité du design est un lieu unique, et plus que légitime, pour porter des rencontres entre industriels et créateurs, au travers d’évènements comme Présent >< Futur. Le but de ces expositions est à la fois de témoigner de la pluralité des pratiques du design contemporain, avec un cycle d’expositions monographiques et une collection éditoriale, avec trois designers invités par an, mais aussi de mettre en relation chaque designer invité avec une PME de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Le principe est de mener une expérimentation sur site, afin que l’entreprise valorise son savoir-faire industriel, tout en donnant un espace d’expression concrète au designer. Cette collaboration est ensuite retranscrite dans l’exposition.
Quels sont les résultats de cette approche ?
L.S. Eh bien, pour la première exposition de ce cycle, vous avez ainsi la designer Laureline Galliot qui collabore avec la Maison Benaud, entreprise lyonnaise qui crée et fabrique des tissus et moires, et qui est très active dans le secteur de la décoration, de la mode et de la haute couture.
Vous touchez des publics très divers ?
L.S. Oui, c’est le but. Pour ancrer le design au cœur de notre société et aider les designers à agir sur des problématiques stratégiques, il est important de n’exclure aucun public. Notre règle de conduite est de diffuser le design afin de le valoriser en tant que discipline créatrice de valeur, tant culturelle qu’économique. Nous nous appuyons pour cela sur la Biennale Internationale Design Saint-Étienne, bien sûr, mais aussi sur diverses expositions, éditions, la Cabane du design ainsi que des conférences ou ateliers.
Une interview de Christophe Chaptal
Article précédemment paru dans le Design fax 1295