Du cannage, du tissage en relief, des liens multiples… Dans le off de la Design week de Milan l’assemblage et le joints était un thème phare de 2018.
Retour à l’essentiel : fixer, coller, assembler, lier, articuler, emboîter, raccorder, bref, joindre. Pendant la semaine du Salone del Mobile, un des points d’attraction a été la fabuleuse exposition « U-Joints Equations of universal lifestyle ». Le joint ? Apparemment, rien de moins sexy. Le plus souvent, il est d’ailleurs masqué. Il est pourtant une des premières préoccupations du designer qui assemble, accorde, combine, connecte… L’exposition U-joints, Equations of universal lifestyle en a montré toute la diversité et la beauté. Sur 1300 m², des joints par centaines, fixes, mobiles, cachés, en bois, en fer, en plastique 3D ou non, en élastiques, en velcro, des nœuds, de la colle époxyde, des compressions, des façons de torde, d’encastrer, des matériaux de toutes sortes et de toutes les couleurs se sont découvert.
De l’art ancestral, japonais et chinois, de la construction en bois aux joints industriels de toutes sortes les assemblages les plus délicats ou surprenant étaient exposés par familles. Surtout, plus d’une cinquantaine de produits de designers, étaient donnés à voir, parfois pour la première fois, des produits finis – piétement orange de la table Edison de Vico Magistreti pour Cassina en 1988 ou l’Ali Bar chair de Max Lamb en 2017 (au premier plan de la photo de une) – aux prototypes. Ainsi Plug-in de Ronan et Erwan Bouroullec, une suspension écran avec des branches de châtaignier reliées par de petites pièces souples imprimées en 3D de la série Screen, àune suspension écran avec des branches de châtaignier reliées par de petites pièces souples imprimées en 3D de la série Screen, ou encore Leather Hinge de Cecilie Manz avec ses lamelles de cuir fixant l’équilibre de la table. Souvent, le joint même faisait tout l’équilibre de la pièce.
Les « obsessions » d’assemblages d’Alvar Aalto à Pierre Charpin, en passant par les inventions d’Ingo Maurer, ont été autant de source d’inspiration quand, au mur, une frise de 40 mètre de long, réalisée par les étudiants en seconde année de Master design produit de l’Ecal classifiait l’ensemble des jointures. Une belle idée, imaginée et mise en scène par Andrea Caputo et Anniina Koivu à la galerie Plus Design. On attend le catalogue avec impatience.
Comme un miroir à toutes ces possibilités de « faire tenir ensemble », de façon fixe ou mobile, répondaient plusieurs éclatés : la Bell chair de Jader Almeida éditée par le Brésilien Sollos présentée Palazzo Litta ou encore la NO1 de Nendo (une des stars du salon) chez Fritz Hansen. La première chaise toute en bois depuis la Grand Prix d’Arne Jacobsen en 1957. La chaise d’Oki Sato compte 23 pièces aux jointures travaillées pour qu’elles donnent l’impression d’à peine se toucher. Cette jointure délicate et précise la fait aérienne.
Entre découvrir les joints – pièce essentielle – et donner à voir le montage, la Design week s’essayait à une nouvelle forme de transparence. Un moyen de montrer tout l’art de la conception et du montage du design.
Cette créativité propre au design, cette manière de joindre ou de rejoindre s’exprimait avec drôlerie dans l’installation les Géants et les nains de Stephan Hürlemann Horgenglarus pour le plus vieux fabricant suisse de chaise, Horgenglarus. Avec sept marionnettes géantes (et pouvant être activée grâce à des poulies) recomposées à partir de pièces de chaise et tables du fabricants, Stephan Hürlemann revisitait avec humour l’art de la composition.
Cet article a été écrit par Soizic Briand, rédactrice en chef d’Admirable Design. Soizic, après une semaine passée dans la capitale lombarde, vous propose une analyse des grandes tendances et des signaux faibles du Salone del Mobile 2018 via des conférences personnalisées. Intéressé(e) ? Contactez-la sur info@admirabledesign.com.