Gérard Caron, la passion pour le design publicitaire

Dans le site « Elle ne connaît pas la crise », un site clairement destiné aux pme, son fondateur et journaliste Pascal Le Guern dresse des portraits.
Cette fois-ci, c’est notre rédac chef Gérard Caron qui est sur la sellette.

On y découvre que c’est en mélangeant de la farine et du sucre que sa vocation de designer lui est tombé dessus. Enfin, presque…

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Un peu d’huile, de sucre, d’eau et de farine

La fibre artistique de Gérard Caron se manifeste très tôt, alors qu’il n’est encore qu’un enfant, né juste avant la guerre, et sa passion pour le design lui vient sans doute de sa mère qui était couturière. Gérard Caron joue déjà à l’épicier, mais pas de n’importe quelle façon. Avec un peu d’huile, de sucre, d’eau et de farine, il fabrique de petites étiquettes sur lesquelles il dessine des marques. Puis, il les vend à ses parents et à ses sept frères et sœurs. Le jeune designer en herbe va même jusqu’à dessiner des affiches publicitaires et concevoir des emballages de fortune ; premiers pas dans le domaine du packaging et du logo.

« Aujourd’hui, des parents mettraient le doigt sur l’affection de l’enfant pour le design. Mais, il faut bien comprendre qu’à cette époque, cela n’existait pas, et encore moins en province. », explique Gérard Caron. Né en Normandie, c’est dans ce contexte que s’exprime sa passion. Attiré par leur esthétisme, il collectionne les affiches publicitaires, sans savoir qu’il pourrait bientôt en faire son métier.

La guerre d’Algérie éclate. Gérard Caron est mobilisé. Le jeune homme y part pendant vingt huit mois. C’est de ce côté de la Méditerranée qu’il entend parler d’une école qui enseigne la publicité et la création. C’est la révélation ! « J’ai alors pris conscience que cette passion qui m’animait depuis toujours, pouvait aussi être un métier. »

Encore soldat dans le génie, il décide de prendre des cours par correspondance et commence à apprendre, sous sa tente, la typographie, la mise en page, l’utilisation des couleurs. Sa voie est désormais tracée : il deviendra publicitaire.

L’ère de la pub…

De retour en France, il poursuit sa formation à l’École supérieure de publicité à Paris, d’où il sort major de sa promotion, en travaillant en parallèle dans une banque pour financer ses études. Très vite, Gérard Caron réalisera son rêve et se retrouvera chef de publicité dans des agences aussi célèbres que Publicis, Young & Rubicam et Ted Bates où, dans les années 1970, il travaille pour des marques de renom, telle que Danone. Il est choisi pour concevoir le logo et le packaging d’un produit de la marque. Il se pose alors cette question : « Pourquoi construit-on un logo et un packaging de manière aussi légère, alors qu’en terme de communication, on effectue des analyses très sérieuses et on construit des plans médias ?  » Lui vient alors l’idée d’associer les règles du marché à celles du design.

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Les quatre mousquetaires de Carré Noir

Trois de ses collègues, Michel Alizard, Michel Disle et Jean Perret, décident de l’accompagner dans cette aventure. En 1973, il ouvre l’agence Carré Noir. Nouvelles méthodes d’analyse, de comparaisons de packagings, de logos. Sous un même toit, l’agence traite aussi des espaces de vente pour la marque. Un concept révolutionnaire qui a servi de modèle à toutes les agences de design, aujourd’hui conçues à cette image.

Londres, Tokyo, Bruxelles… Carré noir travaille également pour les États Unis. « J’ai pu y rencontrer des designers venus de tous les horizons. De Belgique, d’Angleterre… Dans ce vivier, j’ai trouvé des petites structures dans le même état d’esprit que nous, à la recherche d’un concept comme celui de Carré Noir. », raconte Gérard Caron.

En 1980, Carré Noir remporte un concours international de design lancé par une marque japonaise.  » Quand j’ai vu le dynamisme du Japon, sa culture des nouvelles technologies, je me suis fait la promesse d’y revenir au moins deux fois par an, même sans avoir d’affaires à y traiter afin de montrer aux Japonais que les Français étaient des gens fiables, capables de tenir leurs paroles « . Depuis, Gérard Caron fait des affaires florissantes avec le pays du soleil levant.

Tous les deux ans, il décide également de créer au moins un évènement, afin de faire parler de l’agence. Première agence à avoir intégré les nouvelles technologies de design informatique, Carré Noir fait appel pendant cinq ans à des sophrologues et des hypnotiseurs, afin d’explorer l’inconscient des consommateurs face aux marques.

En 1998, l’agence emploie 150 personnes de quinze nationalités différentes, avec des filiales et des bureaux à Tokyo, New York, Turin, Bruxelles et Londres. Les créations sont nombreuses : 13 000 packagings, 1 200 logotypes, 90 concepts de points de vente, aussi célèbres que Lancôme, Carrefour, PSA Peugeot-Citroën, Aérospatiale, Shell, Virgin, Michelin ou le symbole du RPR… et de François Mitterrand !

Il y a dix ans, Gérard Caron et ses associés décident de vendre Carré Noir à Publicis. Le designer publicitaire crée alors un réseau, Caron Design Network, qui fait appel à des talents au fur et à mesure des projets dans lesquels il s’engage. « Aujourd’hui, je fédère des talents autour d’un même projet. Un réseau flexible qui se fait et se défait au fur et à mesure des contrats. » Il poursuit également un rôle actif, comme consultant sur le plan international, pour le compte d’agences de design et de certaines sociétés.

Interview mené par Laetitia Pomarat, journaliste

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