JL Dumeu : le Carlos Ghosn du design ?

Cela fait deux ans que Jean-Louis Dumeu a précipitamment quitté Landor pour prendre la présidence mondiale de Futurebrand à New York. Une prise de risque.

Brillante carrière pour ce Frenchy qui en a surpris plus d’un.

Qu’est-il devenu ?

Rencontre avec Gérard Caron à New York et à Paris…

arton1784.jpg

En 2003, le président de Landor Europe et Asie, Jean-Louis Dumeu, qui pouvait prétendre à la première place mondiale dans ce groupe américain, crée la surprise en quittant brusquement son poste. Il prendre la tête d’un réseau, récemment constitué, Futurebrand.
Gérard Caron a voulu faire le point avec lui. Plus déterminé et clair que jamais, Jean-Louis lui est apparu comme un homme déterminé, épanoui et factuel. Une sorte de Carlos Ghosn du design ?
En tout les cas, une nouvelle race de manager dans le métier.

Gérard Caron : Revenons sur ce départ, qui n’a pas été bien compris de ce côté-ci de l’Atlantique…

Jean-Louis Dumeu : Cela a correspondu à un moment pénible de ma vie privée ou j’ai dû amortir un choc émotionnel fort *. Mon bureau, les clients, les collaborateurs de l’agence et l’agence elle-même me rappelaient ce décès. Il me fallait passer à autre chose.

Pourtant, en tant que numéro deux de Landor, je m’y trouvais bien et les résultats étaient là. J’avais un énorme besoin de me reconstruire ailleurs. L’offre Futurebrand est arrivée à ce moment là. Je n’ai pas hésité alors que j’avais un lien émotionnel fort avec Landor qui est une société que je respecte.

Cela s’appelle tourner la page d’un seul coup…

GC : Il a fallu s’adapter à une nouvelle vie…

JLD : Je te l’ai dit : je n’ai pas hésité, j’ai pris deux valises et je suis parti laissant mon appartement à Paris tel qu’il était… Aussitôt arrivé, j’ai trouvé un appartement à Chelsea dans Manhattan, ou je me sens bien… Je compte y rester.

Puis, j’ai fait le tour des vingt agences Futurebrand réparties dans le monde, rencontré toutes les équipes, restructuré l’ensemble, chassé les talents, repensé une stratégie, motivé le réseau, fixé des objectifs…

GC : Les résultats sont-ils là ?

JLD : L’année 1 (2004), les comptes étaient à l’équilibre, alors que cette société était toujours dans le rouge, l’année 2 (2005) est bénéficiaire et l’année 3 (2006) nous allons exploser !

GC : Il y a donc une méthode Dumeu ?

JLD : Je considère que le marché du design est sinistré en terme de talents. Il manque une génération capable de faire du management. Je ne parle pas du métier de designer, mais bien de celui de manager du design ; c’est un métier différent qui nécessite de l’expérience, de l’entraînement, le goût des gens… et du design, une vision du business. Et ça marche.

Quand je suis arrivé j’ai décomposé mon emploi du temps ainsi :

30 jours d’audit où j’ai rencontré tout le réseau,

15 jours pour monter une stratégie avec les équipes,

30 jours pour enclencher le nouveau plan « Future Day » dans les 20 bureaux du monde. Je suis allé moi-même le présenter.

J’ai également monté « Futurebrand University » pour créer un niveau d’expertise élévé dans le groupe. Cela consiste à travailler pendant trois ou quatre jours et nuits, sur des thèmes particuliers comme la stratégie, l’innovation, le new business. A la fin de chaque cession il y a un examen avec remise de diplômes.

GC : Vos concurrents doivent commencer à s’inquiéter…

JLD : Nos concurrent en réalité sont aujourd’hui les grands cabinets d’audit, les Mc Kinsey et compagnie ! Le design doit provoquer les profits et le désir. Tout le reste…

Nous évaluons avec nos méthodes ce qui permet à une marque d’espérer d’améliorer ces deux critères. Après avoir trouvé, nous appliquons et déclinons.

Nos clients paient les services bien en amont du design. Mais les profits qu’ils en tirent sont immenses…

* Le décès de son épouse, des suites d’une longue maladie