On ne cesse de parler de nostalgie, de tradition, de recette ancestrale, dans un univers de technologies omniprésentes où le jeunisme médiatique continue de faire des ravages dans lun monde de vieux !
Il y a de quoi faire tourner votre Mac en bourrique !
Rassurez-vous, le maître Jean-Jacques Evrard, de d/g Brussels, va vous expliquer cela … non sans humour.
Vieux machins, retro-futur et tralaladitions…
Une étude réalisée par d/g*brussels répertorie pas moins de 24 tendances dont le retro-marketing qui vient dans le peloton de tête. Divisée en 8 moyens d’expression, cette tendance de fond devrait encore croître dans les années à venir. En route pour le bon vieux temps…
Quand vient le temps du retour aux sources.
Observer sans cesse le marché permet découvrir en premier les tendances, de les analyser pour mieux les comprendre et surtout de déterminer les bons leviers pour les appliquer avec succès. C’est grâce aux produits de grande consommation achetés régulièrement dans les supermarchés d’Europe, d’Asie (Chine et Japon) et des USA que la classification des tendances est tenue à jour. Et comme dans le marketing tout se tient, ce qui est vrai pour les produits, l’est aussi pour le packaging et la communication.
Une pyramide des âges en forme de sapin !
Vous qui êtes nés après la guerre et avant mai 68, vous formez le gros des troupes des consommateurs. Et les plus nantis de surcroît. Vous avez connu la naissance des premières grandes marques.
A cette époque elles étaient peu nombreuses et la concurrence était soft ! On trouvait du Spa et pas de Badoit, de la Materne et pas de Bonne Maman, du Coca et pas de Tao, du Vim et pas de Calgon, des Simca mais pas de Kia, du Lacoste et pas de Nike, la Sabena et pas Ryanair, les banques avait d’autres noms : Générale de Banque, BBL, Crédit Communal, Kredietbank…, Pour téléphoner : RTT, comme télé, only RTB, BRT et RTF en noir et blanc seulement.
GPS, Ipod, GSM, web site, e-mail, alicaments, produits bio, marketing éthique, étaient des concepts inconnus. Bref, pas la moitié du quart d’un huitième de ce que le marketing nous offre aujourd’hui. Et vous voilà à l’aise dans vos chaussures, toujours jeunes de corps et d’esprit malgré qu’on vous dit seniors…
Rassurez-vous, c’est la même chose à Tokyo, London, Chicago, Paris et Londerzeel.
Vous êtes donc, tout comme moi, des cibles de choix pour les multinationales plus avides de vous vendre leurs produits que de vous garder dans leur staff !
Au crépuscule de votre vie, la nostalgie s’empare de vous. Les psy diront que c’est par besoin de réassurance et de sécurité (oui, c’était mieux avant), que c’est par besoin de revivre son enfance (oui, c’était le bon temps), que c’est par envie de tradition (oui, en ce temps-là, le jambon avait du goût)… Alors, si la nostalgie revêt ses huit costumes.
C’est pour mieux vous croquer, mon enfant !
Mais ne vous croyez pas les seuls atteints, les jeunes aussi ont besoin de nostalgie (ouf !). Eux, c’est principalement la réassurance et la sécurité qui les touchent. Et la reconnaissance que de votre temps, c’était pas mal après tout.
Allez, en voyage, Simone… roulez jeunesse…
Le grand 8 de la tradition…
La tradition, la vraie…
On y trouve les produits qui existent depuis de nombreuses années et qui ont été maintenus dans leur emballage d’origine (ou presque). Par exemple la bière Orval, la boîte ronde Nivéa, les 20cl verre Coca-Cola et Perrier, les galettes Quaker, le chocolat Toblerone, les Chokotoff, les biscuits Destrooper, les moutardes Maille et Amora dans ses verres décorés, Yakult, Kikoman, Tabasco, Heinz ketchup, Bertolli… et même pour les plus branchés les appareils photo Lomo… Et les montres Breitling (leur site est un vrai voyage dans le passé), les stylos Montblanc, le 5 de Chanel, les Harley Davidson et les fameux bonbons Werther Originals et leurs belles campagnes pub !
Il faut saluer ici la détermination et la qualité de pensée des personnes qui gèrent ces marques. Elles font preuve d’intelligence car il faut du temps, de la patience et de la créativité pour construire une légende.
La tradition inventée…
Il existe pas mal de produits tout nouveaux mais créés pour faire « vieux ». C’est le cas de la bière Passendale, des nouveaux goûts des petites tablettes et le choco à tartiner 
Côte d’Or, le fromage Lou Peyrac (et son berger qui préfère ses chèvres à sa femme), le Rustique, la gamme La Laitière de Nestlé, les confitures Nostalgie de Materne,… Ces produits sont purement marketing, faits industriellement mais au look ancien. Les éléments que nous, bureaux de packaging design utilisons sont des typographies typiques, des couleurs riches ou sombres, des textures de tissus, de bois ou papiers anciens, des dessins plutôt que des photos, des codes emballages anciens (pots en terre, fermetures métalliques pour bocaux et bouteilles, boîtes en fer blanc, carton brut, toile, tissus vichy, bois marqué au fer,…)
N.B. Entre ces deux types d’expression, il y a aussi les produits plus très nouveaux mais qui ont utilisé les codes tradition lors de leur mise sur le marché. Par exemple les produits Bonne Maman d’Andros (années 70), les produits de soin Le Petit Marseillais (années 80).
La distri a elle aussi son mot à dire avec les « Reflets de France » et sa version belge les « Souvenir du Terroir ». Il s’agit de produits « relativement » artisanaux, vendus dans un emballage qui met en évidence la côté « fait main ». Très belle initiative.
La tradition qui se découvre…
Ce sont les marques « normales » qui soudain se découvrent anciennes et font sortir du tiroir (plutôt du terroir), leur créateur. Comme Charles Gervais sur le marché français, Giovanni Panzani, le re-lancement par Duvel-Moorgat de la bière Vedett créée juste après guerre, le retour des magazines Life et Pif Gadget…
Le retro-futur ou la tradition revisitée…
Ici, principalement des produits à haute valeur technologique, revisités mais en gardant leurs caractéristiques fondamentales. Le Beetle de VW, la nouvelle mini, la Ford Thunderbird (aux USA)… Dans la mode, on doit remarquer le superbe come-back de Burberry.
Les codes tradition…
Certaines marques utilisent quantité de codes « tradition » pour donner à leurs produits la tradition qu’ils n’ont, en réalité, pas du tout… On parle de camembert « moulé à la louche », de purée Mousseline à l’ancienne façon presse purée, de chips Croky à l’ancienne dans un sachet plastique traité vernis mat pour faire papier, illustré avec un vieux à lunette qui admire sa création (Geppetto et Pinnochio ?) et sa version Lays trouvée en Grèce… bref, on verra peut-être bientôt du bordeaux foulé aux pieds, voire même des croquettes roulées main !
Les remakes…
C’est le cas d’anciens produits réédités dans leur design d’origine ou adaptés dans une version boîte métal, souvent vendus en séries limitées. Delacre, Côte d’Or, Kellogg’s, Coca, sont friands de ce genre de promo. P&G vient de rééditer son tonnelet Dash pour célébrer ses 40 ans.
Les stores, la storia…
Le commerce n’échappe pas non plus au phénomène. Le succès des magasins « tradition » n’est plus à démontrer. Dans le food, on trouve Oliver & Co, le Pain Quotidien (superbe concept belge exporté avec succès, en Europe et aux USA), Neuhaus,…
Au Japon, les magasins qui vendent des produits artisanaux (tous exceptionnels au niveau design) sont multiples. Dans le non-food, on trouvera l’Occitane, Ralf Lauren et chez nous Bouvy. Levis a aussi joué très fort sur la tradition avec son célèbre 501. Dans les pays anglo-saxons, on trouve quantité de shops « old style » où on y vend du « brol » à l’ancienne (bougies, déco, objets médiévaux, teddy bears, rasoirs rabots, éponges naturelles, électro-retro,…
De son côté, Disneyland n’est-il pas lui aussi quasi 100 % retro-land ?
Les produits dérivés.
On voit apparaître quantité de produits qui véhiculent les marques anciennes. Soit sous formes de cartes postales, posters, statuettes, plaques émaillées qui reprennent les pubs d’antan, soit sous formes d’objets détournés ou réédités comme la vaisselle à l’image de Banania, de LU, de La Vache qui Rit, etc…
Pour terminer, un bonus… la tradition est aussi très présente dans l’univers sonore. Le succès de Radio Nostalgie n’est plus à démontrer. La RTBF y goûte aussi avec le retour de Claude Delacroix dans Flash Back et la création de Classic twenty-one et particulièrement Vinyl Victims sur Classic 21… Le succès des émissions télé, Les Enfants de la télé, Le Pensionnat et du film Les Choristes ne font que confirmer la tendance.
La tendance rétro est donc bien présente dans toutes les couches de produits et de services. Et elle a encore de beaux jours devant elle. Vous qui lisez ceci, avez-vous de la tradition en vente ou à vendre ? Pensez-y, c’est dans les vieilles marmites qu’on fait la meilleure soupe, non ?
