Christian Guellerin, directeur de l’Ecole de Design à Nantes, nous fait partager cette fois-ci ses réflexions sur le design en tant qu’outil de management…
Reconnaissons que nous en sommes encore très loin en France.
Raison de plus pour l’écouter, non ?
Le design : une valeur managériale.
Pour réussir à pérenniser la capacité d’innover, il faut adapter la structure : il s’agit d’organiser l’institutionalisation de la création. Dans son ouvrage, « l’entreprise créative », James Christiansen identifie plusieurs leviers organisationnels pour ancrer la pratique de l’innovation et permettre d’améliorer les performances de création. Le design devient alors pratique managériale, pour générer les opportunités d’un avantage concurrentiel durable.
Les grands groupes industriels, Renault, Philips, Sony, Seb, Alcatel, Décathlon…ont depuis longtemps mis en œuvre une politique qui rattache le design à la direction générale et donne aux designers un pouvoir de décision à parts égales avec les responsables du Développement et du Marketing.
Cette fonction transversale doit cependant trouver sa place entre les fonctions hiérarchiques classiques et notamment la Production et le Marketing-communication.
Il est enfin deux aspects qui consacrent le design comme valeur managériale : d’une part, il permet de se projeter dans l’avenir, de voir loin, devant soi, et entraîne évidemment toute la structure. Sa pratique devient alors l’occasion d’une démarche objective et un levier d’entraînement. Il oblige dans une démarche structurée de gestion de projet à fixer les étapes intermédiaires ou ultimes d’une marche en avant.
D’autre part, il permet sans frein de fédérer tous les acteurs quelque que soient leurs compétences techniques ou niveau d’expérience. Il s’agit de réunir, travailler ensemble dans le même élan sur les projets de création. Le Design consacre la transversalité, l’échange, la réunion de toutes les forces, la gestion de projet dans une démarche de management participatif. Le produit, l’innovation deviennent l’affaire de tous sans clivages, ni chapelle.
C’est un formidable moteur de la motivation. D’autant que la création, dans son côté transcendant, touche les valeurs ultimes de la satisfaction, les valeurs spirituelles. Trouver « quelque chose de nouveau », penser que cela est important revient à transcender la réalité et aller au delà : c’est un donner un sens, donner du Sens.
Enfin et pour conclure, je reprends la devise des « compagnons du Tour de France » : « la main est esprit ». Le Design en France a gardé cette tradition du travail de la main, du dessin. Elle est l’outil qui donne réalité à l’intention, à l’esprit. Elle permet même, comme l’artiste dont le pinceau lui a « échappé », d’aller au-delà de la conscience. Il s’élève alors…
Au moment où l’économie, l’entreprise, les individus sont en manque de repères, face aux enjeux mondiaux auxquels nous serons confrontés prochainement, le Designer devient l’artisan de ce travail sur le sens pour que l’économie soit enfin et définitivement au service de l’individu.
Christian Guellerin
Directeur de L’Ecole de Design Nantes Atlantique