Philippe Picaud est ce designer qui a créé le département design de Décathlon en 2001, avec le succès que l’on connaît. Aujourd’hui il est à la tête de 70 créateurs ! Gérard Caron a eu envie de le rencontrer, on comprend pourquoi …
GC:Quel regard avez-vous de votre parcours de designer ?
PhP : J’ai envie de répondre qu’il est typique d’un parcours de … designer international,puisqu’il m’a mené en Afrique du Sud, aux Etats-Unis, en Angleterre et en France.
Après les Arts Appliqués à Paris, je suis allé deux années aux Usa, y passer un master en design industriel. Au retour j’ai travaillé dans une petite agence de design à Paris avant d’aller en Afrique du Sud pour deux ans y designer des caravanes et mobile homes !Puis retour en France chez Texas Instruments en tant que responsable du design international. Sept ans plus tard je crée le département design d’Alcatel, avant de me retrouver chez Philips pour y mettre sur pieds un service design de la téléphonie mobile. C’est en 2001 que je me retrouve chez Decathlon pour bâtir la direction du design.
GC:Ving années de design, cela laisse quel goût dans la bouche ?
En dehors de toutes les satisfactions personnelles, je dirais que sur le plan professionnel, au fond de moi je suis déçu que l’on ait réussit en vingt années à ne créer que quelques grands directeurs de design. Alors que parallèlement d’autres professions ont connu une explosion de grands talents et de leaders.
Le design s’est contenté d’améliorer sa technicité, de devenir plus professionnel…D’où cette certaine déception que je ressens.
GC : Les visiteurs d’Admirable Design savent que Decathlon est devenu un des passages obligés pour un jeune designer …
PhP : Nous recevons, il est vrai, de nombreux actes de candidatures.
Nous recrutons des jeunes par les relations que nous entretenons avec quelques écoles de design.Nous accueillons de nombreux stagiaires et …faisons des propositions aux plus talentueux d’entre eux.
GC:Que représente encore le design pour un designer au parcours aussi riche que le vôtre ?
PhP : A mes yeux le design est une attitude et une aptitude. Une attitude parce que l’on s’adresse à des individus anonymes, donc il ne faut pas attendre une reconnaissance dans ce métier. C’est aussi pour cela que l’on peut y souffrir dans son fort intérieur.
Notre récompense est de voir un produit que l’on a designer entre les mains d’un autre. C’est tout.
Qui connaît un Roger Tallon, en dehors du petit cadre de notre métier ? Même les meilleurs d’entre nous restent inconnus.Comparez avec les stars d’autres corporations ; certes, il y a le cas particulier du phénomène Stark !
Le design est aussi une aptitude à questionner dans un environnement évolutif…Et cela, peu la possède réellement.
GC:Vous travaillez parmi de jeunes, voire de très jeunes designers. Quelles qualités recherchez-vous chez les candidats que vous recevez ?
PhP : En plus des qualités que doit contenir le dossier – mais cela, c’est facile à évaluer- il y a les qualités de l’individu : l’esprit d’ouverture, ce qui veut dire aussi une capacité à la générosité, l’ autonomie personnelle (l’art de se gérer)et l’intelligence.
GC:Ce sont donc les clés pour réussir une carrière chez Décathlon ?
PhP :
Beaucoup de jeunes possèdent les qualités que j’ai citées.Mais ceux qui « marchent » le mieux sont ceux qui prennent des initiatives ; pour la simple raison que nous, au management, nous n’avons pas de temps de penser à tout.
J’ajouterai aussi, qu’un bon designer aujourd’hui doit s’avoir communiquer…
GC:Vous accueillez des candidats étrangers ?
PhP :
C’est un point sur lequel je dois travailler : nous n’avons que trois étrangers sur soixante-dix designers ! Et c’est dommage. Mais je n’ignore pas que cela est dû à des raisons historiques de la marque. Il faudra du temps pour changer cela. Mais cela reste un objectif pour moi …