Région Île-de-France et design

Pour ce premier jour de déconfinement, rencontre avec Valérie Montandon, conseillère de Paris et conseillère régionale d’Île-de-France, qui est particulièrement sensible au design en général et à ses implications dans la vie économique en particulier.

Valérie Montandon, pouvez-vous vous présenter ?
V.M. J’ai passé 18 ans dans l’industrie textile et de ce fait ai été plus que sensibilisée aux différents aspects du design. Je suis aujourd’hui élue à Paris et conseillère régionale Île-de-France. En début de mandat j’ai été présidente du Lieu du design. 

Quelle est votre vision du design ?
V.M. Pour moi le design devrait être utilisé de façon systématique par tous les acteurs, tant publics que privés. Par conséquent, lors de mes prises de fonctions, mon challenge a été de faire comprendre que le design n’est pas seulement de l’esthétique ou du style mais une démarche transversale qui touche tous les compartiments de l’offre (innovation, valeur d’usage, etc.) et tous les secteurs des biens et des services. Disons, pour faire bref, que le design doit s’envisager en amont d’un projet, quel qu’il soit.

Comment la région promeut-elle le design ?
V.M. D’abord, nous sommes la première région à avoir inscrit le design dans sa politique, et ce au plus haut niveau. Ainsi, nous nous sommes dotés d’un Conseil stratégique du design, que je préside, dont la mission est de contribuer, auprès de Valérie Pécresse, la présidente de la région, à la définition et au déploiement d’une politique régionale en matière de design. De façon concrète, la région agit selon trois axes  : premièrement, il s’agit d’informer les acteurs économiques de la région des bénéfices concurrentiels et économiques tangibles qu’ils peuvent retirer du design en communiquant de façon continue sur les bienfaits du design, exemples à l’appui, ou comme en ce moment en prônant l’avantage du design dans le développement de solutions urgentes liées au déconfinement (accueil de personnes dans les collectivités et les entreprises, pratique du sport, restauration, etc.) car les designers détiennent cette expertise qui consiste à mettre l’humain au centre d’une problématique puis développer les solutions innovantes et pertinentes qui s’y rattachent ; ensuite, nous avons développé un certain nombre d’outils permettant de mettre en relation entreprises et designers – je pense notamment à la plateforme « Le hub du design » ; et enfin, via le financement, car c’est un levier très efficace.

Justement, en quoi consiste ce financement ?
V.M. D’une façon générale nous disposons de trois véhicules : INNOV’up (à titre d’information, 38 millions d’euros ont été versés spécifiquement pour cette aide en 2018), TP’up et PM’up. Si ce ne sont pas des aides établies spécifiquement pour le design, elles permettent de financer sans aucun problème des projets qui font appel au design. Nous venons également de lancer, compte tenu de la situation liée au Covid-19, et en partenariat avec l’État et Bpifrance, un plan d’urgence pour les entreprises franciliennes.

Vous mentionniez Le hub du design au cours de votre réponse précédente. Qu’en est-il exactement ?
V.M. Le hub du design, qui était auparavant rattaché au Lieu du design (ndlr : aujourd’hui disparu), est désormais géré par la région. Cette plateforme numérique, qui a référencé 1 500 designers, permet aux designers et aux entreprises d’entrer en relation via des propositions de projets ainsi que des offres d’emploi ou de stages. La plateforme présente également les financements dont j’ai parlés pour ceux qui veulent utiliser le design comme levier d’innovation ; elle présente aussi des témoignages en faveur du design, ainsi qu’un fil d’actualité.

En matière d’appels d’offres, comment la région intègre-t-elle le design ?
V.M. Voyez l’un de nos appels d’offres récents  : il s’agit d’un marché public pour concevoir par une démarche de design le Centre de Documentation et d’Information « du futur » des lycées franciliens. Voilà qui est représentatif de nos actions en faveur du design. De manière générale, nous cherchons à intégrer au maximum le design dans nos appels d’offres.
Le design doit être comme un réflexe pour l’ensemble nos agents : ils doivent penser design comme ils pensent normes environnementales, et en particulier dans le cadre des appels d’offres.

Quelles sont les relations de la région avec les institutions et les écoles ? 
V.M. Nous sommes partenaires de l’Observeur du design et du Prix Design & Science. Quant aux écoles de design, nous les avons par exemple incitées l’année dernière à aller Dubaï pour assister au Global Grad Show, ce qui leur a permis de nouer des liens avec des écoles étrangères ainsi que de s’ouvrir à d’autres cultures et façons de faire.

Quelques mots pour terminer ?
V.M. Je voudrais rappeler que pour le nouveau siège de la région, qui sera bientôt inauguré,  nous avons tenu à faire appel à des designers pour la fonctionnalité du bâtiment : cela pour vous dire que nous appliquons à nous-mêmes les bienfaits du design !  Plus globalement, il convient de souligner que, sous l’impulsion de sa présidente, la région s’est beaucoup transformée – transfert du siège, numérisation et télétravail – et que le design a joué un grand rôle dans le cadre de cette transformation. Enfin, nous avons lancé une étude en début d’année pour juger de l’état des lieux de la région en matière de design. Permettez-moi, à ce propos, de mentionner deux données intéressantes : songez que 73 % des designers salariés en France sont localisés dans la région Île-de France et que 20 % des entreprises de cette même région considèrent encore que le design n’est pas stratégique !

Une interview de Christophe Chaptal

Article précédemment paru dans le Design fax 1153